Lycéens et apprentis au cinéma

Lycéens et apprentis au cinéma est un dispositif scolaire qui s’inscrit dans la politique de sensibilisation et d’éducation artistique du jeune public conduite par le CNC.
Dans ce cadre, les lycéens et les apprentis découvrent des œuvres cinématographiques lors de projections organisées spécialement à leur intention dans les salles de cinéma. Grâce au travail pédagogique d’accompagnement conduit par les enseignants et les partenaires culturels, ils se constituent les bases d’une culture cinématographique.
En Languedoc-Roussillon, le choix a été fait d’accompagner les films par des interventions en classe d’artistes et de professionnels du cinéma. Chaque classe bénéficie donc de 3h d’atelier. Par ailleurs, la projection de l’un des films du programme est précédée d’un court-métrage méditerranéen, en présence des réalisateurs ou producteurs, en partenariat avec le Festival Cinéma Méditerranéen de Montpellier.

ELEPHANT MAN

de David Lynch – 1981 – Etats-Unis – 2h05

Le chirurgien Frederick Treves libère John Merrick, un homme-éléphant, de la foire où il est exhibé. Découvrant que Merrick n’est pas un attardé, il le soigne et décide de l’instruire.

C’est un râle douloureux qui s’échappe d’une cagoule blanche, une silhouette enveloppée de noir se mouvant au rythme d’un boitillement. C’est un visage, difforme, une tête lourde de ses multiples protubérances, aux lèvres déformées, qui lui valurent le cruel surnom d’homme-éléphant. Il faut sept heures quotidiennes de maquillage pour que John Hurt puisse prendre les traits de John Merrick, Joseph de son vrai nom, qui vécut dans l’Angleterre victorienne du XIXe siècle. Derrière ce masque, modelé sur le plâtre du véritable Merrick, l’immense acteur britannique véhicule toute l’humanité de celui qu’on regardait comme un monstre, et que David Lynch sublime dans ce mélodrame poignant qu’est Elephant Man. Du tournage mouvementé, Lynch dira que ce fut son « baptême du feu » de cinéaste. Loin de son Montana natal, le réalisateur se confronte non seulement à un nouveau pays – l’Angleterre – mais aussi à quelques personnalités difficiles, Anthony Hopkins en tête, qui ne cessent de contester son autorité de metteur en scène. De ces accrocs, rien ne transparaît à l’écran. Seules demeurent la maestria du cinéaste, l’atmosphère onirique et cauchemardesque autant inspirée de Tod Browning que de Charles Dickens. Lynch signe le portrait bouleversant d’un être sensible qui, face à la bestialité des hommes, tenta de leur faire voir qu’il n’était pas un animal mais bien un être humain. Un cri de douleur qui, une fois entendu, reste à jamais gravé dans les mémoires.

Elsa Colombani

LA TRAVERSEE

de Florence Mihail – 2021 – France – 1h24

Pour fuir des exactions, la famille de Kyona et d’Adriel quitte son village et prend la route de l’exil. Mais chemin faisant, les deux enfants se trouvent séparés de leurs parents et livrés à eux-mêmes. C’est le début d’un parcours chaotique pour survivre, en faisant face aux trafics, épreuves et entraves. Parcours chaotique avec pour mince ligne d’horizon une liberté rêvée.

L’écriture du film a débuté en 2006 à l’abbaye royale Notre-Dame de Fontevraud, où Florence Miailhe est invitée en résidence par Xavier Kawa-Topor3. Il s’agit de la première résidence du film d’animation sur le site qui conduira à la fondation de la NEF Animation quelques années plus tard. En 2010, le projet fait l’objet d’une exposition4 présentée à Fontevraud, au festival Anima de Bruxelles et au Festival Premiers Plans d’Angers, où le scénario, coécrit avec Marie Desplechin et lu par Ariane Ascaride, gagne le prix du meilleur scénario.

Florence Miailhe s’inspire de son histoire familiale et des carnets de croquis de sa mère, la peintre Mireille Miailhe, mais aussi du drame des migrants d’aujourd’hui, notamment documenté par son mari le photographe Patrick Zachmann.

Il faut dix ans à la productrice Dora Benousilio pour rassembler le financement nécessaire, tout en développant le projet. Le film est réalisé en peinture animée, technique dont Florence Miailhe s’est fait une spécialité. L’enjeu pour la réalisatrice est le passage d’un travail en solitaire, tel qu’elle le mène sur ses courts métrages, à la direction d’une équipe.

La fabrication du film, coproduit par la France, l’Allemagne et la Tchéquie, se répartit entre plusieurs studios : XBO Films à Toulouse, Balance Film à Dresde et Maur Films à Prague. Elle débute par la réalisation à Toulouse de plus de 500 décors, confiée à dix décoratrices. Quatorze animatrices et un animateur travaillent ensuite sous la direction de Florence Miailhe simultanément dans les trois pays, où quatorze bancs-titres sont construits pour les besoins du film. La réalisation dure trois ans5.

La musique est composée par Philippe Kumpel et enregistrée en Allemagne. La voix de la narratrice est interprétée par Florence Miailhe elle-même dans la version française, et par Hanna Schygulla dans la version allemande.

En 2017, le scénario, accompagné de la projection des décors réalisés à Toulouse, fait l’objet d’une lecture publique6 à l’abbaye de Fontevraud par Isabelle Carré à la suite de laquelle La Traversée est lauréat de la Fondation Gan pour le cinéma7. En 2019, le film est présenté en work in progress au festival d’Annecy, où il reçoit en 2021 la mention du jury pour le long métrage.

LES CHANSONS QUE MES FRERES M’ONT APPRISES

de Chloé Zaho – 2015 – Etats-Unis – 1h34

Une enfance dans une réserve indienne

Johnny et Jashaun sont frères et soeurs. Ils sont nés et vivent depuis toujours dans la réserve indienne de Pine Ridge, dans le Grand Ouest américain. C’est la réserve la plus pauvre des États-Unis, minée par l’alcoolisme et le chômage. Leur vie s’organise autour de la débrouille pour aider au foyer — tenu seulement par leur mère, Lisa —, de l’école et de la vie avec les copains dans l’immensité des Badlands, ces montagnes qui constituent le paysage alentour. Fraîchement diplômé, Johnny projette d’arrêter son trafic d’alcool et de partir s’installer avec sa petite amie Aurelia à Los Angeles. Mais la mort brutale de son père et la culpabilité d’abandonner sa petite soeur vont bientôt lui faire revoir ses plans.

Les Chansons que mes frères m’ont apprises est le premier long métrage de Chloé Zhao, jeune cinéaste sino-américaine. Tourné avec très peu de moyens, il se déroule au sein d’une véritable réserve indienne dont elle a cherché à capturer la réalité quotidienne. À travers les portraits de Jashaun et Johnny, elle réalise aussi celui de ce lieu singulier, abandonné par les pouvoirs publics, et interroge les notions d’identité et d’attachement à un territoire. Chloé Zhao est revenue dans cette région pour y tourner son second film, The Rider (2017), ainsi que le troisième, Nomadland, pour lequel elle a reçu l’oscar de la meilleure réalisatrice en 2020. En 2021 est sorti son quatrième film, Les Éternels, vingt-sixième épisode de l’univers cinématographique Marvel, tourné avec un budget de 200 millions de dollars.

https://www.cnc.fr/cinema/education-a-l-image/lyceens-et-apprentis-au-cinema/dossiers-pedagogiques/fiches-eleve/chansons-que-mes-freres-mont-apprises-les-de-chloe-zhao_1722002

Les difficultés d’une famille amérindienne mises en scène avec une admirable proximité.

Coproduit par Forest Whitaker et réalisé par Chloé Zhao, jeune Chinoise aventureuse, cette fiction sur la vie dans la réserve de Pine Ridge, dans le South Dakota – haut lieu d’une tragédie amérindienne, le massacre de Wounded Knee –, s’est nourrie d’une proximité rare de la cinéaste avec son sujet.

Au lieu de plier le réel à sa fiction, elle a constamment remodelé l’écriture du scénario et le tournage sur les événements quotidiens survenant à Pine Ridge. On peut parler d’une fiction en immersion. A quelques exceptions près, elle a été tournée avec des non-professionnels, tous d’origine indienne (de la tribu des Lakotas principalement).

Cela tourne autour d’une famille typique : père disparu, mère seule avec trois enfants, dont un en prison. Johnny termine ses études secondaires et trafique de l’alcool (denrée prohibée car elle décime la population), sa petite sœur Jashaun le suit à la trace et tente de se faire de l’argent de poche. Autour d’eux, le rodéo, la violence, le hip-hop, l’amour, la mort… La vie des ghettos de banlieue transposée dans les grands espaces du western.

Un aspect presque mythique

Qui dit espaces physiques dit également trouées dans la fiction, littéralement phagocytée par la nature ; celle-ci a une fonction presque régulatrice, voire apaisante, à l’opposé de la ville, accélérateur de pulsions. D’où, malgré une situation générale plutôt dramatique (violence, alcoolisme, prison, pauvreté…), la relative douceur du film.

Comme le titre du film le suggère, cette chronique d’un peuple en (dé)perdition, qui tente tant bien que mal d’acclimater ses traditions dénaturées à la modernité anglo-saxonne, a un aspect presque mythique. La douceur du regard de l’ange candide du film, Jashaun, truchement par lequel on observe le frère se débattre contre la fatalité et contre l’emprise de la communauté, magnifie cette œuvre aussi simple qu’entêtante.

https://www.lesinrocks.com/cinema/les-chansons-que-mes-freres-mont-apprises-21015-04-09-2015/


Le contenu pédagogique

Pour les élèves

  • Une projection par trimestre dans une salle de cinéma partenaire
  • Un dossier pédagogique de 24 pages sur chaque film, élaboré par la BiFi (Bibliothèque du Film), l’APCVL (Atelier de production Centre Val de Loire) ou les Cahiers du cinéma
  • Des ateliers (3h)

Pour les professeurs

  • Une formation
  • Un dossier pédagogique et un DVD du court-métrage programmé
  • Un temps de rencontre spécifique pour le choix des films
  • Les documents pédagogiques ainsi que des outils complémentaires sont accessibles sur lyceensaucinemalr.org

Le dispositif prévoit

  • Copie et documentation (enseignant et élève) envoyés par le C.N.C.
  • Présentation du film
  • Entrée aux séances : 2,50 euros par élève et par film
  • Interventions pédagogiques en classe autour des films prises en charge financièrement par la Région