Le grand cinéaste espagnol Carlos Saura vient de disparaître. C’est l’occasion de nous remémorer le long compagnonnage du cinéaste avec l’Institut Jean Vigo et en particulier avec son fondateur Marcel Oms.
Dès la 2ème édition du festival Confrontation consacré au « Cinéma espagnol derrière l’écran » en 1966, le jeune cinéaste était venu présenté son film Les voyous (Los Golfos). Une relation amicale durable va alors s’installer entre le réalisateur et l’historien cinéphile.
Même si Carlos Saura ne reviendra plus à Perpignan, Marcel Oms va faire découvrir au public de ce qui s’appelait alors les Amis du Cinéma ou Confrontation tous les films de ce cinéaste qui fait la jointure entre le vétéran Buñuel et bouillant Almodovar.
Los Goolfos, La Chasse, Pepermint frappé, Stress es tres, tres, La Madriguera, Le jardin des délices, Anna et les loups, La cousine Angélique, autant de films inconnus alors du public qui seront programmés par Marcel Oms avant le succès public du Cria Cuervos en 1976 qui verra ses films suivants projetés dans les salles commerciales.
Une amitié intellectuelle marquée, pour leur génération, par un intérêt commun pour la guerre d’Espagne. Le souvenir des bombardements à Madrid pour Saura, la vision des longue files de réfugiés républicains pour le colliourenc Marcel Oms. Toute l’œuvre de Saura des années 60 et 70 est marqué par le traumatisme de la guerre et la société franquiste étouffante. Marcel Oms écrira un ouvrage sur la « Guerre d’Espagne au cinéma » en 1986 et consacrera deux festivals Confrontation au sujet.
Leur second intérêt commun était le cinéaste Luis Buñuel dont Carlos Sara soulignait l’importance qu’il avait eu sur son œuvre (ils étaient également très proches) et Marcel Oms qui consacra tout un ouvrage, « Don Luis Buñuel » en 1985 au cinéaste aragonais.
Enfin, Marcel Oms publiera en 1981 un livre consacré à son ami Carlos Saura.
Pour terminer, laissons la parole à Marcel Oms écrivant sur un des chef-d’œuvres de Saura :
«… La Cousine Angélique l’œuvre unique dans laquelle toute une génération se reconnaît, qu’elle soit de gauche, de droite ou indifférente…Ce que Saura a voulu exprimer, c’est que le traumatisme de la guerre dans l’enfance a, dans une certaine mesure, ralenti, voire bloqué, l’accès à la maturité de toute une génération représentée ici par le personnage de Luis. La conséquence en est une série de confusions entre les souvenirs qui fait s’interroger sur les limites de la crédibilité de la mémoire. J’ai déjà écrit que la guerre civile espagnole jouait, pour un certain nombre de nos contemporains, le rôle psychanalytique de la « scène primitive », c’est-à-dire le choc traumatisant de la révélation des origines, dont seule l’élucidation peut remplir le rôle thérapeutique nécessaire… » Marcel Oms (Carlos Saura – édit. Edilig/Cinégraphiques 1981)
Jacques Verdier
Programmateur – Institut Jean Vigo
Nous programmons Carmen, le 1er avril prochain
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